[Marche d’été 2021] Journal Sensible – 3 août, Lalouvesc

Il pleut. Il pleut de cette pluie d’été qui n’empêche pas nos jambes d’être nues et les shorts d’habiller nos cuisses. Nous marchons sur la route. Elle traverse les forêts de résineux et apparaissent dans la bruine, immenses et élancées les éoliennes dont les pales tournent, silencieuses, majestueuses, petites-filles des moulins à vent, transformant l’énergie cinétique du vent en énergie mécanique.

Il pleut. Il pleut de cette pluie d’été qui n’empêche pas nos jambes d’être nues et les shorts d’habiller nos cuisses. Nous marchons sur la route. Elle traverse les forêts de résineux et apparaissent dans la bruine, immenses et élancées les éoliennes dont les pales tournent, silencieuses, majestueuses, petites-filles des moulins à vent, transformant l’énergie cinétique du vent en énergie mécanique. Nous sommes elles, elles sont nous. Nous convertissons les interviews réalisées le matin à Saint-Agrève en improvisations à jouer le soir à Lalouvesc. Ce temps et ce déplacement nous permettent de passer d’un état à un autre, de celui de réceptrice à celui d’émettrice, d’accueillir un don et de le redonner aux personnes de l’étape suivante. Il pleut donc et nous arrivons dans notre refuge, le Café du Lac, place du lac, lac qui restera une fiction pour nous. Nous échouons là, plutôt nous nous amarrons là, QG protecteur, fournisseur de galettes, thés et cafés, et de crêpes au Nutella à 3€. De là nous nous dispersons pour inviter. Il pleut et les pèlerins sont rares sous leur cape. « Bonjour, je suis comédienne, nous jouons un spectacle d’improvisations à 18H30 au Café du Lac, c’est gratuit, ça dure 30 minutes, si vous voulez vous joindre à nous, vous êtes les bienvenus ».

A 18H30 le café est quasi vide, nous espérons concerner une dizaine de personnes. Coup de théâtre. Une pèlerine se pointe et avec une douce voix « Nous pensons venir avec les familles de l’Abri du Pèlerin, nous serons une trentaine ». Joie de la panique, le café est trop petit, vite, il faut organiser la représentation dehors, le tenancier et la tenancière s’activent, sortent les parasols pour nous mettre à l’abri, essuient les chaises. Chacun, chacune trouve une place, enfants et parents. Ils et elles nous regardent et nous voyons toutes leurs pupilles converger vers nos paroles. Nous revivons, quelques milliards de minutes plus tard l’aventure de Jean Dasté, qui lui même revivait quelques milliards d’heures plus tard celle de Molière « Le théâtre de ceux qui voient ». Au sortir de la guerre, aux origines de la décentralisation culturelle, la compagnie théâtrale de Jean Dasté joue dans les nuits et sur les places de Saint-Etienne, ville alors essentiellement minière. Applaudissements. Réveil. Nous ouvrons désormais le débat démocratique, la seconde partie du spectacle. Maintenant c’est vous qui pouvez parler. « Vous avez joué un homme alors que vous êtes une femme, est-ce que cela demande une technique particulière ? ». « Merci beaucoup, c’était super » « Moi je pense que ce que vous avez raconté c’est impossible, un homme qui en 6 mois est quitté par sa femme, perd son boulot et dont en plus la mère décède? C’est pas possible » « Mais, ce sont des personnes que vous avez réellement rencontré ce matin ? » « C’était très bien je crois que tout le monde a passé un bon moment mais pourquoi vous ne traitez pas d’une thématique plus lumineuse comme la joie ! » « Pourquoi avez-vous choisi le thème des peurs sociales et intimes? »

 

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